Plumorama

Plumorama : Aurélie Mendonça

 

Photo par Carré & Kawaii Photographie.

 

Pour la dernière interview de la semaine (Utopiales oblige), nous avons retrouvé Aurélie Mendonça au Dépôt Imaginaire et elle a bien voulu nous répondre ! (oui, ça me surprend à chaque fois)

 

Merci à elle et à très vite !


 

What about a dragon ?

 

Bonjour Aurélie Mendonça !

 

Vous êtes autrice, notamment des diptyques Tarots Divins et Zombitions puis Zombiguïté, aux éditions Rebelle, mais également blogueuse sur le Terrier de Lily où vous évoquez l’écriture, le statut d’auteur, etc.

 

Merci donc d’avoir accepté de prendre le temps de répondre à nos questions dans le cadre de ce panorama des plumes de l’imaginaire !

 

Première question, je sais qu’elle est fréquemment posée en salon : est-ce que vous vivez de votre plume ?

 

Aurélie Mendonça

 

Pas du tout ! Je ne vis pas de ma plume, je suis bibliothécaire, ce qui me permet de vivre très chichement (les métiers du livre, ça ne marche pas très bien).

 

WAAD

 

Est-ce que vous l’envisagez ou l’avez envisagé ? Est-ce que vous aimeriez bien ? Parce que j’ai l’impression que la réponse à cette question altère beaucoup le rapport qu’un auteur peut avoir par rapport à ces thématiques.

 

Aurélie Mendonça

 

J’y ai pensé mais je ne l’ai pas trop envisagé parce que cela supposerait un trop grand investissement pour moi. Si je décidais de vivre de ma plume, cela voudrait dire se mettre à travailler sur mes bouquins huit heures par jour, un vrai métier dans tous les sens du terme. Or, je pense que je ne suis pas prête à voir mes livres comme une source de revenus fixes. Ça me mettrait une forme de pression de toujours produire pour avoir de l’argent. Je préfère avoir mon boulot à côté plutôt qu’avoir la pression sur l’écriture qui reste vraiment un plaisir.

 

WAAD

 

Récemment, on entend beaucoup parler du syndrome de l’imposteur. Pour résumer, il s’agit du sentiment d’illégitimité que peut avoir un artiste vis-à-vis de ses pairs et de son art lui-même. Est-ce que ça vous parle ?

 

Aurélie Mendonça

 

Ça revient fréquemment mais ça n’est pas tout le temps présent. Il y a des moments où ça va, où je me sens à l’aise, y compris dans les cercles littéraires. Et puis il y a d’autres moments où je me dis que d’autres font mieux et où je me demande si j’ai assez d’envie, de talent et de force pour travailler autant. Dans ces phases, je m’inquiète : pourquoi les gens lisent mes livres ? C’est quand même pas grand chose, etc. Dans ces cas-là, c’est dur de travailler.

 

WAAD

 

Qu’est-ce que c’est un auteur pour vous ? Et qu’est-ce qu’il faut pour être professionnel ?

 

Aurélie Mendonça

 

C’est une question que je me suis posée récemment. Pendant le NaNo, on voit une quantité incroyable de gens qui se mettent à écrire. Je me suis posé la question de la légitimité à ce moment-là parce que tout le monde se dit auteur. A la fin du NaNo, j’ai fini un roman, mais si tout le monde écrit aussi, pourquoi serais-je plus un auteur qu’eux ? Est-ce que je me dis professionnelle ? Au final, on m’a donné cette réponse : c’est comme les gens qui font du bricolage chez eux et les professionnels, qui montent des maisons. Au final, je corrige mes textes et je vais jusqu’à la publication. Je pense que c’est surtout le travail de correction et l’envie d’aller jusqu’au bout qui importe. Il y a pour moi des auteurs professionnels qui ne sont pas publiés dans des maisons d’édition.

 

WAAD

 

En ce moment, il y a en France, et un peu partout en Europe, un vrai mouvement de fond pour une meilleure reconnaissance de l’importance des auteurs dans le milieu du livre (pétition du SELF, développement de la Charte des auteurs jeunesse, etc.), est-ce que vous suivez ces mouvements / vous reconnaissez dans ces revendications / en êtes éloignés ?

 

Aurélie Mendonça

 

De manière un peu schizophrène, je suis assez impliquée là-dedans mais pour les autres. C’est vrai que quand on invite des auteurs à faire des choses, je trouve ça normal qu’ils soient payés, mais dans le même temps je me demande pourquoi on me payerait moi pour faire ces mêmes choses. Pour les autres, je trouve que c’est un combat qui est vraiment important (surtout pour ceux qui en vivent, mal), donc je veux bien aider mais au final pour moi ça va être compliqué.

 

WAAD

 

Est-ce que vous vivez certaines situations comme des injustices en tant qu’auteur ?

 

Aurélie Mendonça

 

Pas spécialement non. Je m’éloigne toujours un peu des cercles où il peut y avoir ce genre d’injustices. A titre personnel, je fais mon travail. S’il arrive des trucs qui ne vont pas, ce sera donc partiellement ma faute.

 

WAAD

 

Si on s’intéresse maintenant à l’écriture proprement dite, est-ce que vous suivez un processus d’écriture particulier quand vous créez ? Des horaires fixes, une cadence, quelque chose comme ça ?

 

Aurélie Mendonça

 

J’aurais beaucoup aimé. Pendant un temps, quand je ne travaillais pas, j’avais vraiment un programme de la journée pour l’écriture. Maintenant, j’écris un peu quand je peux. J’essaie de me mettre dans une routine avec un thé, de la musique, etc. et je fais des plages de 25 minutes. Pas plus, parce que je n’arrive pas à rester concentrée ensuite. Quand ça va, je peux écrire pendant trois heures d’affilée, mais sinon 25 minutes c’est déjà bien.

 

WAAD

 

Souvent on parle d’architectes, c’est-à-dire d’auteurs qui planifient leur roman de A à Z avant d’écrire, de jardiniers, qui laissent vivre leurs personnages, ou d’employés polyvalents (OK, celui-là est de moi), comment vous vous positionnez par rapport à cette question de la plus haute importance ?

 

Aurélie Mendonça

 

J’aimerais bien être architecte. Le dernier roman que j’ai écrit, et qui va sortir bientôt, je l’ai vraiment construit comme un architecte. J’ai pris beaucoup de temps pour préparer la base du roman. Mais sinon généralement c’est du freestyle. Je commence sans connaître la fin. Même quand je fais un vrai plan, je ne le suis jamais. J’envie les gens qui sont capables de vraiment suivre leur plan.

 

WAAD

 

Si on s’intéresse à tes récits, un thème qui revient souvent c’est le thème de l’inhumanité. Dégoût, revendication ou simplement questionnement ?

 

Aurélie Mendonça

 

Je pense que c’est plus un questionnement. J’aime aller voir comment l’humanité réagirait face à une monstruosité. Dans mon prochain livre, j’ai plus de revendications, parce que c’est un thème qui me tient à cœur, mais sinon non.

 

WAAD

 

Pour terminer, et avant de vous remercier, avez-vous des choses à ajouter ou dont vous voudriez parler ? Avez-vous des projets dans les tiroirs ?

 

Aurélie Mendonça

 

J’ai une sortie en début d’année prochaine normalement. Il s’agit d’un roman, Pandémonium, qui se passe dans le milieu des pompes funèbres avec une héroïne capable de parler aux morts. C’est un récit qui parle de deuil et du rapport à la mort. C’est une vraie revendication sur notre propre mortalité, pour vivre le jour comme si c’était le dernier. C’est un cheminement qui m’a demandé un gros travail et un gros investissement, et je suis assez contente de faire passer ce message dans une histoire. Pour ce qui est de mes projets actuels, je continue sur ma lancée avec un roman centré sur le deuil numérique, et pour ne pas être toute seule dans ce nouveau cheminement, je suis accompagnée dans l’écriture par quelqu’un de très important pour moi. Du boulot en perspective !

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