Plumorama : Pierre Léauté
Salut les dragonautes !
Avec toute la bonne humeur du monde, Pierre Léauté a accepté de répondre à nos questions, et on le remercie pour ça !
What about a dragon ?
Bonjour Pierre Léauté !
Vous êtes l’auteur, aux édition Mû, des Temps assassins, une trilogie en cours, et du diptyque Mort et Guerre aux grands. Si ces séries ne partagent pas grand chose en commun, elles reflètent votre amour pour l’uchronie.
Merci d’avoir accepté de prendre le temps de répondre à nos questions dans le cadre de ce panorama des plumes de l’imaginaire !
Première question, je sais qu’elle est fréquemment posée en salon : est-ce que vous vivez de votre plume ?
Pierre Léauté
Bonjour aux dragonautes ! Comme beaucoup de mes camarades, l’écriture permet de rajouter un peu de beurre sur des épinards récoltés ailleurs. Bien que j’y pense parfois, ce n’est pas une obsession personnelle que de vivre de ma plume. Le succès est chose virevoltante, et j’apprécie de ne pas dépendre financièrement de quelque chose d’aussi fugace.
WAAD
Est-ce que vous l’envisagez ou l’avez envisagé ? Est-ce que vous aimeriez bien ? Parce que j’ai l’impression que la réponse à cette question altère beaucoup le rapport qu’un auteur peut avoir par rapport à ces thématiques.
Pierre Léauté
Je comprends les difficultés que rencontrent certains auteurs dont la rémunération est aujourd’hui de plus en plus menacée. C’est enfoncer une porte ouverte que de rappeler que, sans eux, la chaîne de l’édition serait coupée net.
WAAD
Récemment, on entend beaucoup parler du syndrome de l’imposteur. Pour résumer, il s’agit du sentiment d’illégitimité que peut avoir un artiste vis-à-vis de ses pairs et de son art lui-même. Est-ce que ça vous parle ?
Pierre Léauté
J’ai davantage ce sentiment dans mon travail qu’assis à ma table d’écriture, dans ma bibliothèque. L’imposture, je la ressens principalement comme une déception personnelle, entre ce que j’imagine et ce que je produis. J’essaie d’éviter les comparaisons avec mes pairs car celles-ci sont profondément subjectives, et, pour être franc, elles sont in fine inutiles si elles ne servent qu’à inspirer jalousie ou moquerie. Le syndrome de l’imposteur doit être à la fois intégré et combattu, il est bon d’avoir assez de recul sur son travail pour ne pas le dénigrer outre mesure. L’exercice de l’écriture est si solitaire que l’on en vient souvent à douter.
WAAD
Qu’est-ce que c’est un auteur pour vous ? Et qu’est-ce qu’il faut pour être professionnel ?
Pierre Léauté
Un acharné du travail, un coureur de marathon, un passeur de mots. Ce qu’il faut pour être professionnel ? La volonté de l’être. Pour ma part, je me situe entre les deux ! Juste à la lisière de ce monde pro, mais je crois qu’il suffirait d’une chiquenaude… ^^
WAAD
En ce moment, il y a en France, et un peu partout en Europe, un vrai mouvement de fond pour une meilleure reconnaissance de l’importance des auteurs dans le milieu du livre (pétition du SELF, développement de la Charte des auteurs jeunesse, etc.), est-ce que vous suivez ces mouvements / vous reconnaissez dans ces revendications / en êtes éloignés ?
Pierre Léauté
Je suis de près les tentatives pour améliorer le statut des auteurs en France, mais je considère qu’il y a plus qualifié que moi pour mener ces combats. Tiens, le syndrome de l’imposteur pointe le bout de son nez ! Je soutiens dans tous les cas les initiatives visant à redorer le blason de l’imaginaire en France.
WAAD
Est-ce que vous vivez certaines situations comme des injustices en tant qu’auteur ?
Pierre Léauté
Le mot est fort, j’évoquerais plutôt des anormalités dans la chaîne éditoriale.
WAAD
Si on s’intéresse maintenant à l’écriture proprement dite, est-ce que vous suivez un processus d’écriture particulier quand vous créez ? Des horaires fixes, une cadence, quelque chose comme ça ?
Pierre Léauté
Autres activités obligent, je n’ai pas d’horaires fixes d’écriture. Je suis malgré tout une routine, j’ai besoin de mon petit confort avec le macbook, scrivener, un peu de musique, le chat qui dort à l’autre bout de la bibliothèque… Je travaille surtout la nuit, avec des objectifs généraux. Deux chapitres par mois, soit environ 8000 mots. J’écris lentement. Ma compagne est ma première lectrice.
WAAD
Souvent on parle d’architectes, c’est-à-dire d’auteurs qui planifient leur roman de A à Z avant d’écrire, de jardiniers, qui laissent vivre leurs personnages, ou d’employés polyvalents (OK, celui-là est de moi), comment vous vous positionnez par rapport à cette question de la plus haute importance ?
Si l’histoire ne réclame pas un découpage précis, j’aime à lui donner toute l’amplitude possible, sans restriction. Le diptyque des grands, surtout le premier tome, a été conçu ainsi ! Le personnage d’Augustin Petit a justement évolué au gré des pages, passant de ce vétéran un peu aigri au dictateur taré. À l’inverse, la création de la nouvelle Pacifique a nécessité beaucoup de travail en amont, puisqu’il s’agit d’un journal achronologique de naufragé.
WAAD
Pour terminer, et avant de vous remercier, avez-vous des choses à ajouter ou dont vous voudriez parler ? Vous êtes en train d’achever le tome 3 des Temps assassins je crois ?
Pierre Léauté
Merci à vous ! Je travaille tout d’abord sur le dernier tome de la trilogie des Temps assassins. Ce livre sert de paraquel aux deux tomes précédents et doit également se suffire en lui-même avec un narrateur différent des autres livres. C’est de loin l’exercice le plus difficile auquel je me suis jamais plié. Je dois être un peu masochiste !
Je mets également la dernière touche à La lame de la Révolution, un roman interactif à épisodes qui sera lu sur smartphone sur la manière des Livres dont vous êtes le Héros.
Enfin, parmi tous les projets, j’aimerais participer à l’appel à texte mené par Bertrand Campeis qui dirige une anthologie de nouvelles uchroniques. J’ai eu une idée… renversante !
Merci à vous en tout cas !