Plumorama

Plumorama : Lise Syven

 

Une autrice à l’actualité rapprochée pour clore cette semaine de Plumorama ! Nous sommes ravis d’accueillir Lise Syven, merci à elle pour ces réponses !


 

What about a dragon ?

 

Bonjour Lise Syven !

 

Vous êtes une autrice complète, à l’origine de plusieurs nouvelles et romans jeunesse (la trilogie de la Balance Brisée, aux éditions Castelmore), young adult (les Chroniques de Siwès aux feues éditions du Riez, et Saving Paradise chez Castelmore) mais aussi adulte (Au Sortir de l’Ombre, au Riez). Au-delà de votre casquette d’autrice, vous êtes à l’origine de CoCyclics, LE forum de bêta-lecture qu’on ne présente plus.

 

Merci donc d’avoir accepté de répondre à nos questions dans le cadre de ce panorama des plumes de l’imaginaire !

 

Lise Syven

 

Merci à vous de m’accueillir !

 

WAAD

 

Première question, je sais qu’elle est fréquemment posée en salon : est-ce que vous vivez de votre plume ?

 

Lise Syven

 

Non, pas du tout. Mais en effet, on me pose souvent la question. Car dans l’inconscient collectif, les véritables écrivain-e-s vivent de leurs plumes. Les gens sont souvent surpris d’apprendre que ce n’est pas le cas.

 

WAAD

 

Est-ce que vous l’envisagez ou l’avez envisagé ? Est-ce que vous aimeriez bien ? Parce que j’ai l’impression que la réponse à cette question altère beaucoup le rapport qu’un auteur peut avoir par rapport à ces thématiques.

 

Lise Syven

 

Quand j’étais jeune, je rêvais en secret d’être écrivaine, mais quand j’ai eu le choix de faire des études, je me suis tournée vers une profession stable et je n’ai jamais envisagé que la plume pourrait me faire vivre. L’idée de dépendre de ses ventes et donc du succès m’effraie particulièrement, depuis longtemps.

 

Dans l’absolu, j’adore l’idée de vivre de l’écriture : me lever chaque matin dans le but d’écrire, ce serait génial ! Mais je serais paralysée par la peur de ne pas savoir de quoi demain sera fait. Le système actuel ne rémunère pas assez bien les auteurs pour que je prenne le risque.

 

Je préfère m’accrocher à mon boulot et à ma couverture sociale, de sorte à au moins me sentir plus sereine même si en contrepartie, je me sens souvent épuisée. J’envisage de passer un jour à 80% pour avoir au moins une journée complète dédiée à l’écriture chaque semaine.

 

WAAD

 

Récemment, on entend beaucoup parler du syndrome de l’imposteur. Pour résumer, il s’agit du sentiment d’illégitimité que peut avoir un artiste vis-à-vis de ses pairs et de son art lui-même. Est-ce que ça vous parle ?

 

Lise Syven

 

Oh oui ! Pendant très longtemps, j’ai eu ce syndrome : je me disais « apprentie » de l’écriture, même après avoir publié mon premier roman. Il m’a fallu des années pour me sentir à l’aise avec le statut d’autrice, et encore, je me demande parfois ce que je fais là quand on m’invite à une conférence.

 

Cette tendance s’inverse tout doucement. J’y pense moins. Parfois, quand je suis entourée d’auteurs lumineux avec lesquels je discute passionnément, je me rends soudain compte que je me sens bien et que je suis peut-être à ma place.

 

WAAD

 

Qu’est-ce que c’est un auteur pour vous ? Et qu’est-ce qu’il faut pour être professionnel ?

 

Lise Syven

Un auteur écrit des textes qu’il termine. A mon, sens l’auteur est professionnel lorsqu’il vend ses œuvres que ce soit à compte d’auteur ou d’éditeur. Cela n’a rien à voir avec le fait de vivre de sa plume. Plutôt avec le fait de commercialiser son œuvre, à mon avis.

WAAD

 

En ce moment, il y a un vrai mouvement de fond pour une meilleure reconnaissance de l’importance des auteurs dans le milieu du livre (pétition du SELF, développement de la Charte des auteurs jeunesse, etc.), est-ce que vous suivez ces mouvements / vous reconnaissez dans ces revendications / en êtes éloignés ? (par exemple parce que vous ne considérez pas l’écriture comme un revenu)

 

Lise Syven

 

Je suis de très près tous ces mouvements, car je me sens concernée. En tant qu’autrice, je fais fonctionner la chaîne du livre. Ce système me paraît foncièrement injuste : l’auteur fournit le texte, travaille avec l’éditeur, et il récupère la plus petite part, condamné à ne pouvoir vivre de son écriture sans risquer de tomber dans la précarité.

Je suis dépitée par la façon dont le problème de la CSG a été évacuée alors qu’elle va appauvrir l’ensemble de la profession, encore un peu plus.

 

WAAD

 

Est-ce que vous vivez certaines situations comme des injustices en tant qu’autrice ?

 

Lise Syven

 

Pas directement en tant qu’individu. Mais le fait que les sélections de prix soient majoritairement constituées d’œuvres d’auteurs masculins ou mettant en scène des personnages masculins m’agace beaucoup. Surtout à cause du sous-entendu qu’il suppose : que les femmes écrivent moins bien et que les héroïnes sont moins intéressantes.

 

J’imagine d’ailleurs que c’est pour cette raison que j’écris surtout des romans avec des héroïnes.

 

WAAD

 

Si on s’intéresse maintenant à l’écriture proprement dite, est-ce que vous suivez un processus d’écriture particulier quand vous créez ? Des horaires fixes, une cadence, quelque chose comme ça ?

 

Lise Syven

 

Oui, je suis une régulière. Quand je commence, je me lance dans un marathon à raison d’environ cinq séances par semaine, surtout tard le soir. J’ai besoin d’être seule pour écrire. Et je vis pour ainsi dire dans mon texte.

 

WAAD

 

Souvent on parle d’architectes, c’est-à-dire d’auteurs qui planifient leur roman de A à Z avant d’écrire, de jardiniers, qui laissent vivre leurs personnages, ou d’employés polyvalents (OK, celui-là est de moi), comment vous vous positionnez par rapport à cette question de la plus haute importance ?

 

Lise Syven

 

De mon côté, je suis une voyageuse (j’ai toujours fait crever mes plantes) et j’écris au fil de la plume. Chaque roman est comme un nouveau voyage que je prépare en général depuis des années. Je suis prête à partir quand j’ai abouti à un titre. Je planifie certaines choses, mais pas tout : je connais au minima mes personnages et l’issue vers laquelle je veux emmener mon histoire. Pour le reste des préparatifs, tout dépend. Je fais des recherches si besoin est, je gribouille des mindmaps, et j’écris dès que ce besoin devient oppressant.

 

WAAD

 

Pour terminer, et avant de vous remercier, avez-vous des choses à ajouter ou dont vous voudriez parler ? Votre dernière sortie date d’octobre dernier et a laissé les lecteurs en suspens !

 

Lise Syven

 

Je traite certaines des questions posées ici (le travail préparatoire, la vie de l’auteur, etc.) ainsi que d’autres aspects liés à l’écriture et à l’édition d’un roman dans un guide gratuit que j’ai mis en ligne la semaine dernière : Les Aventures de Robert 2017 – http://lisesyven.com/romans/les-aventures-de-robert-2017/

 

Il sera bientôt disponible à la vente en format papier sur Amazon KDP.

 

Sinon, oui, j’ai laissé les lecteurs de Saving Paradise sur un abominable cliffhanger ! Mais rassurez-vous, l’attente s’est terminée le 15 novembre avec la parution du second et dernier volet intitulé « Au prix du monde ». J’angoisse un peu, j’espère que la fin plaira !

 


Merci à vous pour ces questions !

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